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12 ans de prison pour Abir Moussi : la répression qui soude l’opposition tunisienne

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La quatrième chambre criminelle près le tribunal de première instance de Tunis a rendu son verdict dans l’affaire dite du « bureau d’ordre de la présidence de la République », visant la présidente du Parti destourien libre (PDL), Abir Moussi.

Selon une source judiciaire relayée par l’agence TAP, la cour a infligé à Abir Moussi une peine de douze ans de prison ferme, tandis que Mariem Sassi, dirigeante du même parti, a été condamnée à deux ans de prison, tout en restant en état de liberté.

Abir Moussi est détenue dans cette affaire depuis le 3 octobre 2023, après avoir été arrêtée alors qu’elle tentait de déposer des recours contre des décrets-lois présidentiels auprès du bureau d’ordre de la présidence de la République — un acte politique et administratif transformé en crime pénal.

Sur la base de ce dossier, la chambre d’accusation près la Cour d’appel de Tunis avait ordonné la mise en détention d’Abir Moussi et le renvoi de Mariem Sassi devant la chambre criminelle du tribunal de première instance de Tunis. Les deux sont poursuivies en vertu de l’article 72 du Code pénal, un texte hérité des périodes les plus sombres de l’autoritarisme, prévoyant des peines extrêmes pour des chefs d’inculpation aux contours volontairement flous : tentative de changement de la forme du régime, incitation à la violence entre citoyens, volonté de provoquer le chaos, le meurtre ou le pillage sur le territoire tunisien.

Ce verdict ne constitue ni une exception ni un cas isolé. Il s’inscrit dans une stratégie assumée de mise sous verrou de l’ensemble de l’opposition tunisienne. Partis politiques, figures publiques, militants, journalistes et acteurs de la société civile font face à une avalanche de poursuites judiciaires et de condamnations lourdes, dans un climat où la justice est de plus en plus perçue comme un instrument de neutralisation politique.

Loin de briser les dynamiques contestataires, cette répression a eu pour effet de recomposer et d’unifier une opposition longtemps fragmentée. Face à la fermeture des espaces politiques et médiatiques, l’opposition s’est réapproprié la rue.

Depuis le 22 novembre dernier, des manifestations se tiennent chaque samedi, rassemblant des forces politiques diverses, des organisations citoyennes et des familles de détenus politiques, pour dénoncer la criminalisation de l’action politique, l’érosion des libertés publiques et l’instauration progressive d’un régime fondé sur la peur, l’intimidation et la justice d’exception.

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